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La journée aurait pu être belle. Vraiment belle. Il n'y avait pas de soleil, mais une pluie fine et délicate. Il adorait ça. Il avait toujours adoré la pluie, elle lavait tout le monde de tous les problèmes. Oui, il adorait la pluie.
Quand il s'était levé, il avait remarqué que toute la maison était rangée. Parfaitement rangée. Le petit déjeuné préparé. Un sourire apparut sur son visage.
« - Il est vraiment parfait... »
Il s'était assis et avait commencé à manger en imaginant son cher et tendre en train de tout lui préparer. Il débarrassa et lava sa table, puis alla se laver et s'habiller. Il prit son sac et sorti en fermant la maison. Il se rendit à son travail à pied. Il fut arrivé après quelques minutes de marche. Il salua quelques parents et leurs enfants puis alla dans sa salle de classe. Sa collègue lui rendit visite quand elle eut fini de faire entrer tous les enfants, et la journée commença doucement.
Koushi Sugawara travaillait comme instituteur dans une école primaire. Il avait obtenu son diplôme au lycée Karasuno puis était parti en ville pour ses études. A présent, il se trouvait dans une petite école en banlieue de Tokyo, où il travaillait depuis trois ans. Il habitait avec Daichi Sawamura, son compagnon depuis bien des années. Ils avaient tous les deux fait leurs études au même endroit, d'aménager en banlieue tokyoïte, ensemble.
« - Ils sont un peu excités à cause de la pluie.
- C'est vrai. Mais ils sont quand même adorables avec moi. »
En jetant un regard sur la cour, il observait avec amusement les enfants en train de jouer dans les flaques d'eau. Sugawara était un jeune professeur, il était énergique et très doux avec ses élèves. Il apportait de la nouveauté et de la patience dans cette petite école. Les professeurs et les parents l'aimaient beaucoup, il était leur petit rayon de soleil.
« - Je vais les faire rentrer avant qu'ils ne soient tous trempés. »
La vieille professeure, Mme Mashita ouvrit la porte et appela tous les enfants. En criant et courant, ils se précipitèrent dans leur salle de classe, alors que les professeurs s'adressaient un petit signe en suivant leurs élèves. Koushi continua son cours sur les multiplications, tous étaient très appliqués. L'heure de la fin des cours arriva enfin, et Koushi les accompagna jusqu'au portail où il attendrait de voir leurs parents pour les laisser sortir.
« - Oh le policier ! »
Koushi tourna la tête, s'attendant à voir son amant. Il venait rarement le retrouver à la sortie de l'école, il travaillait la plupart du temps, mais quand il arrivait à se libérer plus tôt, il aimait venir. Et souvent, ces jours étaient les mercredis midi, comme aujourd'hui. Quand il venait, ils rentraient ensemble, mangeaient dans la bonne humeur et passaient leur après-midi dehors à se balader ou à l'intérieur, blottis l'un contre l'autre quand il pleuvait. Aujourd'hui, il pleuvait, Koushi adorait ça, ils allaient rentrer et rester toute la journée dans le canapé, à se raconter des anecdotes sur leurs travails respectifs. Pourtant, ce n'était pas Daichi qui lui faisait signe de l'autre côté du portail.
« - Tanaka ! Comment tu vas ? »
Il se força à lui offrir un grand sourire, mais il était déçu de voir son ami à la place de celui qui occupait ses pensées. Le policier avait dû s'en rendre compte et lui fit un petit signe de la main.
« - Il faudrait que je te parle.
- Bien sûr, attend encore un peu, je dois m'occuper des enfants.
- Non, maintenant. »
Koushi vit maintenant son air sérieux et laissa la charge des enfants à Mme Mashita. Il conduisit Tanaka à l'intérieur de sa salle de classe.
« - Il y a un problème ? »
Son ami regarda autour de lui, gêné. En uniforme dans une salle de classe d'enfants, il détonait, comme si toute la cruauté du monde qu'il voyait chaque jour souillait peu à peu cet endroit habituellement peuplé d'innocents. Il soupira et retrouva un peu de courage.
« - Une intervention à mal tournée. Daichi est à l'hôpital. »
Koushi fit rapidement son sac et le suivit en hochant la tête. Il ravala ses larmes et son angoisse, ne laissant rien paraître. Sans se parler, ils savaient très bien ce qu'ils avaient à faire. Ils traversèrent le hall de l'école en silence, évitant les quelques enfants qui courraient encore devant l'entrée.
« - Sugawara, tout va bien ? »
Mme Mashita posa sa main sur l'avant-bras du jeune professeur et lui donna un regard compatissant. Il hocha la tête et suivit son ami dehors. Ils montèrent dans la voiture de fonction du policier et prirent immédiatement la route vers l'hôpital.
« - Il était en filature sur un gars qu'on cherchait depuis des semaines. Il s'est pris deux balles, l'une dans la jambe et l'autre... dans le torse. Je ne sais pas où exactement, mais il y avait beaucoup de sang. Je ne veux pas que tu te fasses trop d'idées. »
Koushi avait le regard fixé sur le paysage qui défilait rapidement. Tout allait trop vite, tout avait basculé trop vite. Il avait passé une superbe matinée, il avait hâte de retrouver son amant et de se pelotonner dans le canapé, bien au chaud chez eux. Mais il se retrouvait dans la voiture de son ami, à filer à toute vitesse en direction de l'hôpital, où il espérait retrouver son amant en un seul morceau et encore vivant.
Tanaka arrêta la voiture devant la porte de l'établissement en pilant. Koushi courut jusqu'à l'accueil, où on lui indiqua que Daichi était toujours en salle d'opération. Tanaka le retrouva devant la grande porte, la lumière rouge allumée « opération en cours ». Bien vite, des collègues des deux policiers les rejoignirent, ainsi que des amis du blessé. Un grand cri retentit dans tout l'hôpital, qui arracha un léger sourire à Koushi. La seconde qui suivait, une tornade châtain se jeta à son cou.
« - Shittykawa ! Lâche-le ! »
Oikawa le laissa respirer un peu, mais resta collé à l'argenté. Il pleurait, il avait toujours été sensible. Koushi senti une main se poser sur son épaule, une main se voulant réconfortante. Il adressa un regard remerciant à Iwaizumi, ne pouvant rien faire d'autre.
« - Ce n'est pas encore le moment Suga. »
Il hocha la tête. Depuis qu'ils avaient quittés le lycée, Daichi et lui s'étaient beaucoup rapproché du couple phare d'Aoba Johsai. Ils avaient passé de nombreuses années ensembles et se connaissaient très bien maintenant. Ils avaient fini beaucoup de soirées tous les quatre, bourrés comme des coins, à rigoler pour rien. Suga et Oikawa s'étaient toujours très bien entendu, un peu comme Iwaizumi et Daichi. Ils avaient toujours été là les uns pour les autres, accueillant même Oikawa chez eux pendant deux mois alors qu'il s'était engueulé avec son Iwa-chan.
« - Vous êtes là pour le capitaine Sawamura ? »
Koushi se leva et alla devant le médecin. Il avait l'air fatigué, épuisé par une opération trop longue et trop compliqué. L'argenté remarqua son nom sur la blouse : il était l'un des meilleurs de la ville.
« - Je suis son compagnon. »
Il n'avait aucune honte à énoncer haut et fort qu'il sortait avec un homme, aussi merveilleux cet homme était-il. Tout ce qu'il voulait, c'était le retrouver, lui dire tout ce qui lui passait par la tête. Le chirurgien lui indiqua de le suivre, et ils disparurent derrière la grosse porte blanche. La lumière rouge s'était éteinte.
« - Ce que vous allez voir peut-être dur alors-
- Monsieur, je m'en fiche. Je m'y suis déjà préparé, tout ce que je veux, c'est savoir ce qu'il a... et s'il va s'en sortir. »
Le médecin hocha la tête. Il avait vu beaucoup de familles de policiers dans des états impossibles après une opération qui avait mal tourné, mais jamais il n'avait eu de personne comme Sugawara devant lui. Ils étaient dans le couloir, devant la salle de réveil.
« - Il a été amené avec une balle dans la cuisse droite, et une balle dans la poitrine. Pour la cuisse, la balle était re-sortie, mais elle était proche de la fémorale. Il ne devrait pas y avoir trop de problèmes, juste du repos et attendre que le muscle se reforme. »
Koushi était un peu soulagé, un problème de moins sur les épaules. Mais il avait le présentiment que l'autre allait être bien pire.
« - La balle dans la poitrine n'était pas sortie, nous avons dû la retirer.
- Où est le problème ? Qu'est-ce que vous ne me dites pas ?
- Elle a perforé le poumon droit. »
Alors il était mort. On ne pouvait pas vivre avec un poumon perforé, c'était impossible. Le corps ne pouvait pas s'en occuper alors qu'il était affaibli. Il devait aussi reformer le muscle de la cuisse, non, c'était impossible. Pourtant, le médecin ouvrit la porte, et Koushi aperçu son amant, enfoncé dans des draps blancs. Il avait des tuyaux qui sortaient de ses narines, sa bouche, ses bras et un de sa gorge. C'était impressionnant, terrifiant et horrible. Mais dans tout ça, il y avait une machine et son bip incessant, qui indiquait des battements de cœurs. Faibles, mais présents.
« - Le poumon est perforé sur la partie basse. Nous avons réussi à le stabiliser en refermant le poumon au-dessus du trou. Il ne pourra plus jamais faire de trop gros efforts, il aurait sûrement de gros problèmes avec sa respiration. Et il a perdu beaucoup de sang, on lui a fait des perfusions, mais il reste très faible.
- Mais il est en vie. On verra le reste plus tard.
- Sugawara, je voudrais vous avertir de quelque chose. Ce que nous avons fait, à été décidé sur le moment. Je ne connais pas les antécédents du patient et s'il devait arriver quelque chose, j'en prendrais l'entière responsabilité. Il allait agir vite, j'ai fait ce que je jugeais bon sur le moment.
- Monsieur, il est en vie. C'est tout ce qui compte pour moi. Comme vous l'avez dit, vous avez fait ce qui vous semblait bon, au bon moment. »
Le médecin posa sa main sur l'épaule du jeune homme et lui donna les dernières recommandations avant de le laisser avec son amant. Il promit à Koushi de l'appeler s'il y avait le moindre changement dans l'état de Daichi, que ce soit bon ou mauvais.
Koushi s'approcha du lit où reposait son amant. Il était pâle, sa respiration était sifflante mais calme. Il n'était pas paisible non, il avait les traits tirés et il avait mal, Koushi le voyait. Il posa délicatement sa main sur son bras gauche, là où il savait qu'il n'aggraverait pas l'état de son ami.
« - Dit moi ce qui s'est passé Daichi... Je veux comprendre. »
Quand Daichi lui avait annoncé qu'il allait s'engager dans les forces de polices, Koushi avait été très content. Il savait que l'ancien capitaine de volley voulait aider les gens, et à sa manière et à son échelle, devenir policier était parfait pour lui. Il avait toujours une excellente condition physique, un sens des responsabilités et une justice implacable. Il semblait avoir trouvé sa voie, et ça réjouissait pleinement Koushi. Mais un soir, il était rentré et avait retrouvé Daichi allongé dans leur lit, le visage amoché et le bras en écharpe. Koushi avait eu peur, tellement peur qu'il avait faillit faire un malaise. Koushi avait été là pour Daichi, il s'était occupé de lui jusqu'à oublier ses propres études. Il avait failli rater son examen final, mais peu l'importait plus que la santé de celui qui faisait battre son cœur.
Les premières fois que Daichi était retourné sur le terrain après sa blessure, Koushi avait vécu de réels moments de solitudes et d'angoisses. Il avait tout le temps peur qu'un policier passe le pas de leur maison pour lui annoncer que le sous-lieutenant Sawamura était mort en intervention. Alors Daichi et lui avaient longuement parlé, et depuis, tout était plus clair.
Ils avaient mis en place certaines règles. Si Daichi montait en grade, il allait forcément arriver un moment où il allait être très exposé. Il aimait aller sur le terrain et au contact des gens, alors des accidents seraient parfois inévitables. Ils en avaient consciences tous les deux. Daichi avait tenu à mettre les choses au clair : il se pouvait qu'il soit gravement blessé en intervention ou même qu'il y perde la vie, Koushi devait s'y attendre. Ainsi, il savait ce qu'il devait faire dans ce genre de cas. Koushi ne sombrait plus dans l'angoisse à chaque fois qu'il n'avait plus de nouvelles de Daichi, il se contentait juste de profiter au maximum de lui.
Après de longues minutes, il retourna vers ses amis. Les collègues du blessé étaient repartis ; ils devaient s'occuper de celui qui avait envoyé Daichi dans ce lit d'hôpital, Tanaka leur avait promis des nouvelles très rapidement. En échange, il avait appelé d'autres de leurs amis ; Hinata, Kuroo et Akaashi. Oikawa s'était calmé, il discutait avec Kuroo, mais son genou qui sursautait trahissait son stress. Koushi s'approcha de ses amis, un air inquiet sur le visage.
« - Il est stable pour l'instant. »
Des soupirs de soulagements se firent entendre. Koushi remarqua des traces de larmes sur les joues d'Hinata. Ils étaient tous tellement touchés par ce qui était arrivé... Et pourtant lui, il était toujours debout, sans montrer ses sentiments. Il se tourna vers Tanaka.
« - J'aimerai rentrer à la maison, tu peux me ramener ? »
Il hocha la tête et fit un signe à leurs amis. Le trajet fut bien trop calme et silencieux.
« - Tanaka ? Tu peux me raconter comme ça s'est passé ?
- On n'avait rien à faire aujourd'hui, Daichi voulait venir te retrouver plus tôt. Mais il nous a appelé alors qu'il était devant le centre commercial. Il avait repéré un gars qu'on cherchait depuis des semaines, alors il l'a filé. Et là on a perdu contact.
- Comment vous avez su qu'il était là-bas ?
- On a reçu un signal bizarre qui venait de la zone industrielle, alors on s'y est précipité. Et on l'a trouvé. »
Tanaka s'arrêta là. Il savait que ça pouvait aider son ami à comprendre, mais il voulait lui épargner l'image de Daichi, inerte, baignant dans une mare de son propre sang. Il voulait lui épargner la terreur qui l'avait pris quand il avait posé ses doigts contre la jugulaire de l'ancien capitaine de Karasuno et qu'il n'avait pas entendu de pouls. Quand il y repensait, si leur nouvelle recrue, Arlet, n'avait pas insisté, Daichi serait mort dans ses bras. Et il ne se voyait pas l'annoncer à Suga.
L'argenté le remercia quand il le déposa chez lui. Il lui apprit qu'il irait rechercher la voiture de Daichi plus tard, avant de rentrer. La maison n'avait pas changé, ici tout était pareil. Pourtant, Koushi retrouva un petit mot sur le canapé, il avait dû le louper le matin.
Bonjour mon cœur,
Passe une très belle journée
On se voit cet après-midi, j'ai une surprise pour toi.
Je t'aime tellement <3 pour toujours avec toi
Koushi ne put retenir les larmes qui perlaient à ses yeux. Il avait tenu devant leurs amis, mais ici, il ne pourrait pas. L'âme de Daichi était tellement présente dans cette maison qu'il avait l'impression qu'il était là avec lui. Pourtant, Daichi était allongé sur un lit d'hôpital, dans un profond sommeil.
« - J'ai mal, j'ai mal sans toi ! Pourquoi, pourquoi tu m'as laissé ? J'ai besoin de toi, Daichi... Je t'aime tellement, j'ai besoin de toi. »
Un cri de détresse passa ses lèvres, il se laissa tomber à terre, hurlant son désespoir et sa haine, avant de s'endormir dans un sommeil sombre et peuplé de cauchemars horrifiants. Il se réveilla de nombreuses fois, en sursaut, voyant Daichi apparaître devant ses yeux, le corps criblé de balles et la respiration sifflante. Au milieu de la nuit, il alla débrancher le frigidaire ; le sifflement lui rappelait celui qui sortait de la bouche de son amant. Il remarqua par la même occasion un message de Mme Mashita.
Sugawara, je suis de tout cœur avec toi, appelle-moi si tu as besoin de quelque chose. Nous avons trouvé une remplaçante, reste en congé le temps qu'il faudra. E lle est jeune et très attentionnée avec les enfants, elle s'appelle Yachi Hitoka, peut-être la connais-tu.
Un rictus s'esquissa sur ses lèvres ; si Yachi était la nouvelle maitresse des enfants, il n'y aurait aucun problème. Ils avaient perdu contact avec elle depuis quelques années, mais il savait qu'il pouvait compter sur elle. Il la remercia mais ne pu écrire de message plus long. Il se doutait que Tanaka les avait appelés, c'était son genre de faire ça. Quand il y repensait, il avait vraiment des amis incroyables. Il avait été odieux avec eux aujourd'hui, et pourtant, ils étaient toujours présents pour lui.
Il ramassa le petit mot de Daichi, la dernière chose qui le reliait à lui, puis remonta dans leur chambre. Il ne prit pas la peine de se laver et s'effondra sur le lit, espérant pouvoir dormir quelques heures sans se réveiller. Mais ce fut peine perdue, à peine avait-il touché les draps qu'il se perdit dans les profondeurs du manque et de la tristesse. Daichi lui manquait comme jamais, il avait l'impression de ressentir la même douleur qui traversait le corps de son amant. Et c'était ainsi que Koushi Sugawara termina cette journée, enroulé dans les draps portant l'odeur de Daichi, le corps secoué de sanglots étouffés.
Koushi passa la journée suivante complètement prostré chez lui. Il ne mangea qu'un bout de pain et un snack, qui furent aussitôt régurgité. Il but un peu, et ne se leva que pour aller aux toilettes. Il passa la journée enroulée dans les draps, essayant de sentir encore l'odeur de Daichi, tentant en vain de se rassurer. Il n'avait allumé son téléphone et ne voulait pas. S'il le faisait, il allait voir les nouvelles, ce qui se passait dans le monde ou à Tokyo. Ainsi, il verrait que le monde n'avait pas arrêté de tourner, que ses problèmes et Daichi dans un lit d'hôpital n'était rien à l'échelle du pays. Pourtant, son monde à lui, avant complètement cessé de fonctionner. Il était vide, il n'y avait plus qu'une nuit sanglante, le soleil avait disparut avec les beaux jours.
Au bout de vingt quatre heures, la sonnette de la maison retentit. Koushi sursauta mais ne bougea pas. Si c'était un livreur ou un démarcheur, il finirait par partir. Si c'était quelqu'un qu'ils connaissaient, il se dirait qu'ils n'étaient pas chez eux. Un frisson le prit : il n'avait pas prévenu leurs familles. Il savait qu'aussitôt la nouvelle serait apprise, leurs parents se rueraient chez eux, et tout ce dont il avait besoin, c'était de calme. Tant pis, ils l'appendront plus tard. De plus, ça ne servait à rien de les inquiéter, ils ne pouvaient rien faire. Il pensa brièvement aux frères et sœurs de Daichi, qui lui en voudrait à mort, mais il s'en fichait bien. Ils pouvaient le détester autant qu'ils voulaient, s'ils arrivaient à effacer ces derniers jours, il leur en serait bien reconnaissant.
L'inconnu de l'autre côté de la porte s'impatienta, puis se tut. Koushi songea qu'il était parti. Mais la porte de la chambre s'ouvrit brusquement.
« - Bouge toi. »
Il avait le visage enfouit sous la couette, mais il arrivait sans peine à deviner à qui appartenait cette voix forte.
« - Laisse-moi.
- C'est hors de question, alors lève-toi.
- Non.
- Bon sang j'ai l'impression de faire face à Tooru en mode larve le lundi matin... Suga, je te laisse deux minutes pour te lever et aller à la salle de bain, sinon je t'y amène par la peau du cul. »
Un sourire vide prit place sur le visage de l'argenté. S'il s'entendait si bien avec Oikawa, il était pourtant bien plus proche d'Iwaizumi. Les deux s'étaient toujours compris sans avoir eu besoin de parler, un peu comme des frères. Ils étaient complémentaires à un point que ça en devenait presque flippant. Et dans un moment comme ça, alors que personne ne savait comment faire, Iwaizumi était le seul à venir le voir et le remuer. En soupirant, il se leva et alla aux toilettes. Il ne voulait pas passer par la salle de bain, il ne voulait pas voir son reflet. Il savait très bien qu'il n'était pas au meilleur de sa forme, sa santé mentale avait été marqué d'une cicatrice immuable.
Il finit par descendre au salon, où il trouva son ami, penché derrière le frigidaire.
« - Tu peux m'expliquer ce que t'as foutu avec ce putain de frigo ?
- Débranché.
- Ça j'ai bien vu. Bon, assied toi, je te fais un truc à manger. »
Il grimaça quand l'ancien as d'Aoba Johsai lui posa une assiette de toast et un œuf au plat sous le nez.
« - Mange. C'est un ordre. Après on parlera. Mais si tu ne manges pas, tu vas perdre des forces, et Daichi aura besoin de toi quand il se réveillera. »
Quand il se réveillera... Ainsi tout le monde pensait qu'il allait se réveiller... Ou était-ce juste pour ne pas lui faire de peine ? Il ne savait pas. Il n'arrivait pas à imaginer la suite. Il voulait que Daichi se réveille, qu'en fait tout ne soit qu'un mauvais rêve, ou une plaisanterie de très mauvais goût. Mais il avait le sentiment que ça venait juste de commencer. Il englouti l'œuf et la moitié d'un toast avant de repousser l'assiette.
« - Eh bah, j'aurai pensé que je devrais négocier plus que ça. »
Son ami termina l'assiette et la lava. Il vint ensuite s'asseoir à côté de l'argenté.
« - A quoi tu penses ? »
Suga lui donna un bout de papier froissé. Il remarqua au début les larmes et les déchirures de ce papier, à l'image du cœur de Koushi à cet instant. Mais derrière, il réussi à décrypter le message.
« - Il m'a écrit ça le matin. Et moi je l'ai vu que le soir. »
Iwa comprit et hocha la tête. Il regarda un moment dans le vide, laissant un silence complet s'installa. Puis il se leva et mit le papier dans sa poche.
« - Tanaka m'a expliqué ce qui s'était passé. C'est quoi ton plan ? »
Koushi laissa un autre sourire sincère sur ses lèvres. Décidément, son ami était l'un des seuls qui pouvait se vanter de le faire sourire à ce moment.
« - Tu me connais à ce point ? C'est flippant tu ne penses pas ?
- Dit pas de conneries et déballe tout. Celui qui a tiré sur Daichi n'est pas le gars qu'il suivait, et il est toujours recherché. Personne n'a d'indices, le tireur le visait lui et pas un autre. Il avait sûrement un silencieux, parce que personne n'a rien entendu.
- Iwa, tu fais quoi là ?
- Je t'aide. Parce que je n'ai pas envie que tu te fasses tirer comme un lapin. J'ai déjà un ami dans un état critique, je n'ai pas envie de devoir lui annoncer à son réveil que son fiancé est mort.
- Fiancé ? Mais on n'est pas- oh merde. »
Iwa lui lança un sourire confiant et pointa le papier dans sa poche.
« - Tu ne lui diras pas que je l'ai balancé ? »
Koushi secoua la tête et se jeta au cou de son ami. Ainsi, Daichi comptait le demander en mariage ! C'était donc ça, la surprise qu'il lui réservait... Il était juste arrivé une demi-journée trop tard...
« - Pourquoi tu fais ça Iwa ?
- Si je ne t'avais rien dit, tu n'aurais pas voulu me suivre. Maintenant je sais que tu feras tout pour que Daichi te fasse sa demande en vrai, et pas par mon intermédiaire. »
Koushi se rassit, décidé.
« - Alors on fait quoi ? »
Ils passèrent la journée à travailler sur un plan d'attaque. Ils ne savaient pas qui est-ce qu'ils traquaient, ils leur manquaient des informations. A la tombée de la nuit, Iwa faussa compagnie à Suga, pour retourner chez lui.
« - C'est moi je suis rentré !
- Iwa-chan ! »
Oikawa lui sauta dessus, heureux de voir son homme rentrer. Tout en répondant à l'étreinte de son compagnon, Iwa songeait à l'après-midi qu'il venait de passer. Ça ne faisait aucun doute que Daichi ne se réveillerait peut-être jamais, et pourtant, il devait trouver un moyen pour faire tenir Suga.
« - T'as la tête ailleurs Iwa-chan.
- N'importe quoi. Oh tu as fait à manger ?
- Moui. »
Ils mangèrent dans une atmosphère légère, Oikawa racontant sa journée, Iwa écoutant en hochant la tête de temps en temps.
« - Iwa-chan, comment il allait ?
- Pas très bien. Il avait rien mangé et était déshydraté. Et dans un état pire que toi dans tes phases larvaires le lundi matin.
- Hé ! Il faut qu'il reste debout Iwa-chan. Quand Daichi se réveillera, il ira mieux non ? »
Iwa le regarda en souriant faiblement. Il avait presque abandonnée l'idée qu'il se réveillerait, mais Oikawa en semblait persuadé. Il avait toujours été plus sensible que lui... Iwa prit sa main dans la sienne et la serra fortement.
« - Bien sûr. »
Oikawa parut satisfait. Il déposa vivement ses lèvres sur celles de son amant puis alla s'installer dans le canapé, sous sa couverture rose à alien, lançant sa série favorite.
« - Eh tu me laisse encore tout débarrasser !
- Iwa-chan ! Tais-toi j'entends rien ! »
Dans cette ambiance ressemblant au quotidien, les deux amants finirent leur journée, blottis l'un contre l'autre sur le canapé, devant cette série sur les aliens.
Le lendemain, Suga ouvrit à Iwaizumi. Il avait pris une courte douche, mangé un peu et reprit quelques couleurs. Son ami lui envoya un sourire sincère.
« - Je suis passé voir Tanaka ce matin. J'ai récupéré tout le dossier qu'ils avaient sur ce qui s'était passé. Tout le monde a rendu son rapport, ça va être plus simple maintenant.
- Il t'a donné tout ça ? Sans rien dire ?
- Disons que je l'ai emprunté.
- Ca m'aurait étonné autrement. »
Ils se mirent à éplucher tout le dossier, et ce durant deux jours entiers. On était à présent dimanche, ça faisait cinq jours que Daichi était à l'hôpital. Koushi était venu le voir plusieurs fois, et il avait le sentiment qu'il n'y avait pas d'amélioration. Le médecin avait beau lui répéter qu'il fallait attendre, il savait ce qui allait se passer. Et il ne voulait pas y penser.
Iwaizumi passait tous les jours pour le voir, il lui était d'une aide précieuse pour retrouver celui qui avait plongé la vie si parfaite de Suga dans un enfer sans nom. Et aujourd'hui, ils avaient enfin trouvé son nom. C'était un ancien délinquant que Daichi avait mit en prison, le premier qu'il avait attrapé. Il avait commencé comme petit dealer, puis était passé un cran au-dessus quand il avait envoyé deux de ses associés à l'hôpital et un autre dire bonjour au diable. Daichi l'avait arrêté à ce moment-là, et il lui avait juré qu'il le retrouverait quand il sortirait de prison. Malheureusement, il s'était échappé avant la fin de sa peine et avait retrouvé la trace du policier qui l'avait mis à l'ombre durant quelques années.
« - Comment l'équipe de Tanaka a-t-elle pu passer à côté de ça !?
- Je pense qu'ils ont beaucoup à faire avec celui qu'ils ont pu attraper. Et l'absence de Daichi doit peser son poids, il était un élément essentiel.
- Mais justement ! C'est de Daichi dont on parle ! Ils auraient dû mettre tous les effectifs sur le pont et chercher celui qui avait fait ça ! »
Iwaizumi secoua la tête, il n'allait pas raisonner Suga, c'était peine perdue. Les cernes sous ses yeux étaient de plus en plus sombres, il devait passer de très mauvaises nuits. Il se nourrissait le minimum et il passait tout son temps à faire des recherches sur cet homme, Takiho.
« - Bon, comment tu veux qu'on procède ?
- On ? Non, j'y vais tout seul.
- Tu veux mourir ? C'est hors de question. Et tu auras beau être têtu, tu n'iras pas seul.
- Si !
- Tu veux te faire un type recherché pour agression, meurtre, et deal seul ? Et qu'est-ce que tu vas faire avec lui quand tu l'auras trouvé ?
- Je verrais sur le moment.
- Ca c'est non. »
Suga poussa un soupir d'énervement et fit les cent pas dans son salon.
« - Je vais venir avec toi. On va trouver cet homme et on le remettra à Tanaka. C'est ok ?
- Oui...
- J'ai pas entendu !
- OUI !
- Parfait ! On partira mardi, le temps de trouver des armes. »
Iwaizumi avait fait quatre ans dans l'armée, avant de la quitter pour retrouver Oikawa. Il n'avait fait aucune guerre, mais connaissait très bien le genre humain et sa propension à toujours attirer le pire. Il avait gardé des acquis sur ses années de combats et savait toujours très bien se défendre. Il s'entraînait régulièrement avec des armes à feu, qu'il gardait dans un tiroir scellé, dont lui seul connaissait la combinaison du code.
« - Avant tu dois me promettre une chose. »
Iwa regarda Suga sans comprendre.
« - Tu viens et tu m'aides, ok. Mais tu te débrouille pour rentrer en vie et sans la moindre égratignure.
- Et pourquoi ?
- Parce que je ne veux pas que ta jolie petite gueule soit amoché par un type sans importance. Oikawa n'a pas à s'inquiéter pour toi. Tu as vu l'état dans lequel il s'est mis quand il a su pour Daichi ? Alors imagine pour toi. »
Iwa hocha la tête, bien conscient qu'il ne voulait pas que son amant ne s'angoisse pour lui. Il lui cachait déjà beaucoup de chose, il ne voulait pas que ça aille plus loin.
« - Je rêve où tu as dit que j'étais beau ?
- C'est une vérité.
- Dois-je comprendre que je ne te laisse pas indifférent ?
- Iwa, je t'aime beaucoup et tu le sais. Tu es carrément mon type de mec et s'il n'y avait pas Daichi, ni Oikawa, ça fait bien longtemps que j'aurai sauté le pas. Mais tu vois, on s'est rencontré trop tard. Je n'ai besoin que de Daichi, et toi tu as Oikawa. J'aime Daichi bien plus que n'importe qui, je lui confierai mon âme sans hésiter. Toi, tu as juste un corps plutôt avantageux. Après rassure toi, je n'ai jamais attendu quoi que ce soit de toi, juste que tu restes le bon ami que j'ai, sur qui je peux compter comme je le fais maintenant. »
Ils se séparèrent quelques minutes plus tard. Iwa retourna chez lui. Oikawa l'attendait encore, un grand sourire aux lèvres. Cette fois encore, le repas était prêt et servi. Encore une fois, Oikawa lui sauta dans les bras, et Iwa lui rendit son étreinte. Mais cette fois, il ne le libéra pas au bout de quelques secondes. Il profita de la chaleur de son corps contre le sien, de son odeur si agréable, ses cheveux si doux. Il passa sans s'en rendre compte ses mains sous le tee-shirt de son amant et traça des petits cercles avec ses pouces.
Il était plongé dans ses pensées, et ce fut Tooru qui l'en sorti, en laissant échapper un soupir de bonheur. Quand il se rendit compte de ses pensées, il rougit et se détourna.
« - Désolé Tooru.
- Ne soit jamais désolé de me faire ce genre d'effet, Ha-ji-me. »
Il toisa son amant, accentuant les pressions dans son dos.
« - Qu'est-ce que tu as dit ? »
Ils étaient si proches qu'ils sentaient le souffle de l'autre sur leurs peaux. Tooru le dévisagea en s'humidifiant les lèvres.
« - Ha-ji-me. »
Iwa l'embrassa sans attendre. Tooru entoura sa taille de ses jambes et ils rejoignirent la chambre, où ils s'aimèrent librement durant la soirée. Finalement, le repas fumant attendait encore sur la table le lendemain matin.
L'hôpital était désert, à 6 heures du matin. Les infirmières qui avaient croisé Suga dans le couloir l'avait salué mais elles étaient vite reparties travailler. Après tout, il savait parfaitement où aller, le chemin s'était imprimé dans sa tête dès la première fois. Il poussa la porte juste après avoir toquer, se disant que c'était inutile, Daichi ne s'était toujours pas réveillé. Il s'approcha du lit et prit la main de son amant entre les siennes. Sa peau était de plus en plus pâle, et sa respiration sifflante toujours plus faible. Un instant, Suga se dit qu'il était mort.
« - Daichi. C'est moi. Ça fait six jours que tu es là. Les six plus longs jours de toute ma vie. Dépêche-toi de te réveiller, on a tellement de temps à rattraper. Ton absence est trop lourde... »
Il se rendit compte qu'il n'avait toujours pas prévenu leurs familles. Il esquissa un sourire en imaginant la famille de son ami le maudire d'avoir tout gardé pour lui.
« - Daichi, je vais y aller. Ne t'inquiète pas, on se retrouve bientôt. Je t'aime mon amour, pour toujours avec toi. »
Il déposa un léger baiser sur le front de son compagnon et ferma la porte. Il repassa devant le poste des infirmières, qu'il salua en déposant des croissanteries.
« - Merci pour tout ce que vous avez fait. Au revoir mesdames. »
Il ne leur laissa pas le temps de répondre qu'il avait déjà disparu. L'une d'elles se précipita dans la chambre de Daichi et soupira en voyant la valeur s'afficher sur le moniteur.
« - Il est encore en vie ! J'ai eu peur. Mais ... ? »
Suga sorti de l'hôpital et croisa Iwa sur le parking. Il monta dans la voiture.
« - Comment tu savais que je serais ici ?
- Je te connais. »
Il sourit. Suga avait tenté d'aller confronter Takiho tout seul, mais Iwa l'avait cerné et l'avait retrouvé avant.
« - Je t'ai dit que je serais là, je suis là. On commence par où ? »
Suga lui indiqua la direction puis la voiture démarra. En s'éloignant de l'hôpital, Iwa eut la désagréable sensation que c'était la dernière fois qu'il repartirait de l'hôpital avec Suga. Puis il pensa à Oikawa, qui devait encore être dans leur lit, après la nuit agitée qu'ils avaient passée. Dans une autre réalité, lui et Suga auraient pu être plus qu'ami. Il se secoua, ce n'était pas maintenant qu'il devait penser à ça. Ce n'était qu'un moment d'égarement où ils s'étaient dit des choses qu'ils pensaient tout au fond d'eux, comme s'il n'y avait plus de retour en arrière possible.
En arrêtant la voiture, Iwaizumi comprit. Mais Suga avait déjà sauté de la voiture et se dirigeait d'un pas décidé vers la zone industrielle, l'endroit où s'était déroulé le drame quelques jours plus tôt. Il tenta de rattraper Suga à travers le dédale de containers, sans succès. Enfin, il entendit des coups de feu et se dirigea vers le lieu des échanges en montant sur des caissons. Takiho se tenait devant Suga, la jambe en sang. Au jugé de l'ancien militaire, il s'était prit une balle. Mais il avait entendu deux balles de tirées.
Il les voyait en train de se parler, mais de son promontoire, il ne distinguait ni les paroles ni la teneur de la conversation. En ce qui était de Suga, il ne le voyait pas suffisamment pour savoir s'il était blessé ou non. Des cris, Suga visa. Takiho implora, Suga tira. La balle se planta dans la poitrine de l'autre, le tuant sur le coup. Le corps tomba dans une flaque rouge sombre. Iwa soupira en voyant Suga toujours debout. L'autre balle était sûrement une balle perdue.
Au même moment, à l'hôpital, c'était le branle-bas de combat. Les infirmières courraient dans les couloirs, suivant les instructions du médecin.
« - On le perd !
- Chargé. Dégagez ! »
Troisième choc électrique, le cœur ne repartait toujours pas. Insuffisance respiratoire, une infirmière passa le masque d'oxygène.
« - Passez une dose d'adré !
- C'est la deuxième ! »
Le médecin continuait le massage cardiaque, mais au bout de vingt-deux minutes d'acharnement, il abandonna. Leur cœur ne repartirait pas.
« - Daichi Sawamura. Heure du décès : sept heures trente-quatre. Cause du décès : arrêt cardiaque. »
A quelques kilomètres de là, Iwa se précipitait vers Suga. Toujours au téléphone avec Tanaka, il avait vu son ami tomber. Il ne s'était pas relevé et quand Iwa avait retiré la veste ample, il avait découvert où s'était implanté la balle qu'il croyait perdue : dans la poitrine de son ami.
« - Tanaka ! Appelle des secours ! Suga est touché par balle à la poitrine ! »
L'ambulance arriva en même temps que les policiers, Suga fut prit en charge. Il fut prit en charge par les secouristes, qui pratiquèrent un massage cardiaque, insuffisant.
« - Koushi Sugawara. Heure du décès : sept heures cinquante. »
Plus tard, ils apprirent que la balle avait transpercé l'estomac. Suga aurait dû succomber plus tôt, mais le médecin, pourtant rationnel, préféra croire à la force de l'amour.
Dans la salle d'hôpital, tous les amis étaient à nouveaux présents, à la même place que six jours auparavant. A l'exception que cette fois-ci, tous pleuraient. Les parents des deux amants étaient également présents, à la recherche d'explications quant à la mort de leurs fils.
Iwaizumi fut amené dans une autre salle, à la suite des vêtements couverts de sang qu'il portait encore. A peine s'était-il assit sur le lit, qu'Oikawa entra dans la pièce en claquant la porte. Il avait les cheveux en bataille et les yeux rouges. Dans un autre contexte, Iwa se serait moqué de lui. Dans un autre contexte, Iwa lui aurait rit au nez. Dans un autre contexte, Iwa aurait eu une folle envie de l'embrasser et de lui faire l'amour ici, sur ce lit d'hôpital. Mais ils n'étaient pas dans un autre contexte et il ne pouvait rien faire d'autre que ressentir une peine encore plus grande en voyant son amant dans un tel état.
Sans lui laisser le temps de parler, Oikawa lui retira son tee-shirt plein de sang, avant de laisser échapper un sanglot.
« - Tu n'as rien...
- C'est... son sang. »
Oikawa retrouva toute la colère qui l'habitait quelques secondes plus tôt.
« - A quoi tu pensais Iwa !? Pourquoi tu es allé là-bas !? Tu voulais mourir toi aussi ?? Hein, c'est ça, tu voulais en finir ! Mais quand est-ce que tu comprendras que dans un couple, on est deux ! J'ai besoin de toi ! Si tu as des problèmes, tu m'en parles et on règle ça ensemble ! Alors pourquoi tu me caches tout ça !? J'ai besoin de toi, j'ai besoin de te faire confiance ! C'était déjà suffisamment dur pour moi de voir Daichi sur ce lit, maintenant lui et Suga ne sont plus là ! Et j'aurais fait quoi si tu n'étais plus là ? Hein ?! Je te parle Iwaizumi ! »
Jamais, au grand jamais il ne l’avait vu ainsi, autant en colère. Mais c’était parfaitement compréhensible. Ces derniers jours, il avait été là pour leur ami, il avait soutenu du mieux possible son ami, mais il n’avait pas vu la détresse de son propre copain.
« - Je...
- Je t’aime Iwa, je t’aime plus que tout. Mais j’ai besoin que tu sois là avec moi. »
Dans un dernier espoir, Iwa ouvrit ses bras. Oikawa s’y réfugia en pleurant.
« - Je t’aime Tooru. Pardonne-moi pour tout. Quand... Quand on rentrera, je te raconterai tout. Promettre.
- Je te pardonne Iwa. Je t’aime tellement ! »
Leur réconciliation fut marquée par des baisers passionnés et des pleurs. Dans le couloir, le médecin expliquait aux familles Sugawara et Sawamura les faits des derniers jours. Tanaka averti tout le commissariat des mauvaises nouvelles puis chercha Iwaizumi. Il était le seul à connaître toute l’histoire.
Pour Iwa, tout était clair : Suga savait parfaitement comment allait se passer sa rencontre avec le meurtrier de son amant. Il pensait même que s’il n’avait pas réussi à tuer Suga, il se serait donné la mort ensuite. L’idée de vivre loin de Daichi était inconcevable pour lui.
Une semaine plus tard, sous une pluie fine, Iwa et Oikawa se tenaient seuls devant les deux tombes de leurs amis, exceptionnellement mises à côté. Les larmes coulaient sans retenue sur le visage d’Oikawa et il se fichait bien qu’on le voit. Il voulait juste dire un dernier au revoir à ses amis et l’avis de ceux qui ne les connaissaient pas l’importait peu. Iwa restait impassible, mais son esprit adressait aux deux amants tout ce qu’il n’avait jamais pu leur dire.
Avant de partir, Iwa posa sur la pierre tombale deux alliances, ainsi qu’un petit mot en papier froissé. Sur les pierres, un mot avait été gravé à la demande de leurs amis.
« Pour toujours avec toi »
On raconte que quelques jours plus tard, les alliances avaient disparu. Pour certains, des morveux attirés par le métal brillant. Pour d’autres, lorsqu’on priait fort pour ces deux personnes, on apercevait deux silhouettes se tenant la main, des petites bagues en or brillants à leurs doigts.
